Madagascar : Route Nationale 7, Route Nationale Chouette !! (I/II)

Publié le par ptiboutdumonde.over-blog.com

Fraîchement débarqués en territoire malgache, nous retrouvons Sylvie au centre de Tana'. En attendant l'arrivée de notre dernière comparse, Karen, prévue pour le lendemain, nous arpentons pour la première fois les rues de cette ville autrefois française mais bien africaine aujourd'hui. Si le foie gras, le confit de canard, le vin rouge font irrémédiablement penser à notre mère patrie, chaque regard d'enfant, chaque rire sonore, chaque Peugeot 104 nous rappellent que nous sommes bien en terre d'Afrique : une pauvreté visible à chaque regard, une inégalité criante, mais toujours cette joie de vivre et cette sérénité que l'Europe perdit il y a déjà fort longtemps.

 

Karen en poche, nous décidons d'entamer notre séjour par une journée de découverte des fameux Indri, plus grand lémurien vivant à Madagascar, et donc sur terre. Anciennement appelée Lémurie, Madagascar concentre en effet 90% des espèces de lémuriens de notre planète. A quelques 150km de Tananarive, dans la réserve de Périnet, nous firent la connaissance avec ces animaux si particuliers. De toutes tailles, de toutes formes, les lémuriens sont tous de superbes petites peluches posées sur une paire de ressorts leurs permettant de se déplacer de cimes en cimes. L'Indri donc, est le plus grand de tous. Atteignant parfois 1m, il se singularise par sa queue atrophiée mais aussi par son pelage blanc immaculé qui lui offrirait sans nul doute une place sur les étalages de nos plus beaux magasins de jouets. Entre deux caméléons étincelants, nous passons notre journée à observer, amusés, ces trapézistes de la nature effectuant leurs plus belles pirouettes.

14---Madagascar 4493Ce n'est que sur la route du retour que nous découvrons pour la première fois la vraie vie des Malgaches : dans le petit village d'Andasibe, aux détours d'une église de brique rougeoyante, nous rencontrons cette population au sourire inébranlable malgré des conditions de vie éprouvantes. Sans eau ni électricité, sans quoi se vêtir, les Malgaches et leur progéniture si nombreuse (plus de 50% de la population ayant moins de 15 ans) défient chaque jour la misère par leur bonne humeur et leur foi.

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8h ! Rémi, notre fidèle chauffeur, au volant d'un 4x4 flambant neuf, passe nous prendre à notre hôtel. Repus des foies gras de la veille, nous entamons notre périple le long de la Route Nationale 7 qui nous mènera, dans une semaine sur les bords du Canal du Mozambique. Une semaine de route, à travers des paysages variés, alternant déserts et rizières, forêts primaires et villages isolés à plusieurs heures de marche de la route. D'Antsirabe à Ambositra, nous découvrons l'artisanat local, les coutumes ancestrales qui réussirent à subsister en se mêlant habilement à un catholicisme évangéliste.

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14---Madagascar 4558Lors de nos escapades loin de la route principale, nous partons à pieds à la rencontre des villages Zafimaniry, parfois si isolés du reste de l'île. Comme dans de trop nombreux hameaux, ces Malgaches sont exclus de l'économie locale et ne survivent que par la culture parfois maigre de riz, légumes ou manioc. Dévêtus, parfois couverts de haillons nous renvoyant aux images d'un 19ème siècle révolu, couverts de poussière, des centaines d'enfants courent derrière nous à la recherche de cadeaux. Dans un français parfois encore balbutiant dans ces régions, hélant les « vazha », ils nous demandent des bonbons, des gâteaux, des stylos, des bouteilles vides ou nos habits. Si nous ne pouvons tout leur donner, nous leur offrirons volontiers stylos, eau ou gourmandises tout en regrettant déjà de ne pas avoir vidé nos armoires avant de partir... Car ici, plus qu'ailleurs, la vie est dure. Sans véritable issue. Dans un pays qui s'enfonce année après année dans une misère frappante, dans un pays où la corruption fait loi, où les faibles n'ont pour se défendre que leur sourire et leur sagesse, chaque petit geste, même insignifiant, fait sens.

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Reprenant la route, toujours guidé par notre cher Rémi, notre « papa malgache », nous nous écartons pour quelques jours de la sinueuse RN7 pour nous enfoncer dans le canal des Pangalanes, reliant Manakara au sud-est à Tamatave quelques 650km plus haut.

Le long des rives, de villages de pêcheurs en distillerie d'huile essentielle, nous parcourons un sud-est paisible et calme qui subit chaque jour un peu plus son isolement et le poids de la décolonisation. Car, comme nous le rappelle notre guide Ignace, qui, petit garçon acclamait le Général de Gaulle en visite à Tana', l'Indépendance fut voulue par la capitale et est aujourd'hui subie par Madagascar. Bien sûr, il serait simpliste de présenter la période coloniale comme un Eden, mais il apparaît clairement au fil de nos conversations et des routes, que depuis sa prise d'indépendance, l'Ile Rouge s'enfonce irrémédiablement, faisant regretter à l'immense majorité des Malgaches la prospérité, les infrastructures et le système éducatif qui ont marqué la présence française. Partout, chez ceux qui l'ont connue, la nostalgie de cette époque est palpable et sincère. Et les paysages parlent d'eux-mêmes.

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14---Madagascar 477414 - Madagascar 4781Dans un sud-est isolé, où les ports et les aéroports ont été abandonnés, où les canaux s'ensablent, seule la vielle ligne de train FCE semble aujourd'hui relier ces populations au reste de l'île. Crée en 1896, sans réhabilitation depuis, la FCE semble vivre ses dernières heures. Le long des 170km de voies, traversant 17 gares, en 16 heures, nous découvrons avec peine et fracas la vie autour d'un chemin de fer, l'agitation autour de ce mince fil qui relie ces hommes au reste de leur pays. Foules d'enfants, tonnes de fruits, crissements des roulement bringuebalants sur des rails fracassés, locomotives peinant dans les montées, nous laisseront un souvenir douloureux de ce trajet dont nous rigolerons encore dans quelques années.

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De retour à Fiana' pour une courte escale, nous vagabondons quelques heures dans la vielle ville, souvenir encore présent d'une propérité révolue. Revigorés, nous reprenons la route du sud en direction de Ranohira et du massif de l'Isalo. Le long de la route, nous traversons des paysages désertiques d'une rare beauté. Chaque virage révèle un village isolé au milieu de l'immensité. Vivant dans un ensemble de traditions encore ancrées dans le quotidien, les habitants font vivre des rites ancestraux, y compris lorsque ceux-ci les maintiennent dans des conditions de vie difficiles : cérémonies de retournement de mort donnant lieu à des fêtes fastueuses et ruineuses pour les familles, refus d'appliquer de nouvelles techniques agraires afin de ne pas enfreindre les méthodes des ancêtres, circoncisions où le grand-père doit avaler le prépuce de l'enfant entre deux tranches de bananes, destruction de l'ensemble des biens du défunt conditionnant la fin du deuil de sa veuve... La vie, rythmée par ces traditions, est dure. Souffrant parfois de la faim, les habitants de ce sud aride ne refusent pourtant pas notre monde, fêtant chacun de ces événements au son des tubes les plus récents et les plus internationaux : quel contraste étrange...

De ce sud, nous retiendrons aussi ces paysages décharnés, noircis par une culture au brûlis, sculptés par des siècles d'érosion, où seules quelques sources émeraudes apportent un peu de verdure.

 

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Poussant, toujours plus au sud, nous parviendrons finalement à Ifaty, terminus de notre descente le long de la superbe RN7. Deux jours de farniente au soleil, en bord de plage, ponctués simplement d'une sortie baleine. Et quel spectacle ! Trois heures durant, nous admirons six géantes des mers longer les côtes malgaches.

C'est ainsi que se termine notre épopée. Deux jours nous seront tout de même nécessaires pour rejoindre Tana', escale indispensable avant notre départ pour Nosy Be. Le temps de croiser Romain et Céline, au détour d'un restaurant de Fiana'. Petit monde : 5 ans auparavant, nous nous quittions, sans nous revoir depuis, lors d'une soirée mémorable au Métropolis D'Ulan Bator !!!

Ainsi s'achève notre périple « chouette sur la RN7 » !!

Encore un fois, merci pour tout Rémi, ta patience, ta sagesse, ta gentillesse et tes conseils...

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WBBB & WPTB

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B
Salut les ptiboutdumonde<br /> J aimerais continuer à vous suivre même de loin! Sans doute votre activité débordante va vous engloutir mais je vais garder un œil affectueux sur vous je suis sur Facebook ,mon pseudo anbatho<br /> fandamiel<br /> Bonne reprise parmi nous! Ne vous laissez pas avoir par le pessimisme ambiant! La vie est belle'je vous embrasse<br /> Brigitte
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P
<br /> <br /> Bonjour Brigitte,<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> J'espère que vous allez bien. J'organise un diner a la maison et comme vous etes une cuisiniere hors pair, auriez vous des conseils de sites internet pour de belles recettes? Merci d'avance!!!<br /> <br /> <br /> Benjamin<br /> <br /> <br /> <br />
B
Je vous souhaite bon courage pour le retour parmi nous! Vous aurez sans doute la nostalgie de tous ces endroits magiques et inconfortables mais tellement enrichissants! Bonne chance les<br /> ptiboutdumonde. Je vous embrasse'<br /> Brigitte( sulawasi)
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P
<br /> <br /> Merci Brigitte!!<br /> <br /> <br /> J'espère que vous êtes bien rentrés également et que vous continuez à préparer de superbes créations culinaires! Au plaisir de vous revoir :)<br /> <br /> <br /> Benjamin & Audrey<br /> <br /> <br /> <br />
C
A travers vos photos vous m'avez touchée. Beautiful!
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G
pauvre audrey ! tu lui as fait faire combien de km a tirer ton pousse pousse. A part ça, oui, c'est un des trains les plus en ruine du monde, 1ère classe ou pas !!!
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P
<br /> <br /> Et je te parle pas des kilometres en bus, en bateau!!! La fin approche:)<br /> <br /> <br /> <br />
G
Quel plaisir de voir votre reportage sur Mada,mon deuxieme pays de coeur.Je retrouve dans vos photos et textes toute la gentillesse et la joie des malgaches.Grosses bises à tous les<br /> deux,amitiés;Michèle et Gilles
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