Ushuaïa, Terre de Feu...
D'avance toutes nos excuses à nos fidèles lecteurs : nous avons bien tardé à conter la suite de ce P'tit Bout du Monde, mais c'est que les mots nous manquent pour vous dire toute la beauté de ce qui vous attend en cette Terre de Feu !
Des lions de mer, des cormorans, des fjords, des piverts, des lacs, des castors, des rivières, des « zorros » (non, pas le justicier qui sort de la nuit de notre enfance, mais les renards aux reflets argentés comme on les nomme ici ;), des cimes enneigées, des soleils rouges... Ushuaïa, dont nous n'attendions rien de spécial sinon le plaisir de voir imprimé le nom de ce lieu mythique sur notre carte d'embarquement, restera pour longtemps dans nos têtes.
Nous l'avons compris dès l'approche de l'avion qui nous amenait dans ce petit bout du monde : les 35 dernières minutes sont tout simplement somptueuses ; l'avion se fraie un chemin entre les sommets, le long du Canal de Beagle, les montagnes puis les fjords se perdent à l'infini … Il est 8h35, nous venons d'atterrir sur une piste aussi étroite que courte, avec un chalet de bois pour tour de contrôle.
Il règne une atmosphère étrange à Ushuaïa : les bateaux qui partent en expédition pour le pôle Sud côtoient les navires marchands en provenance de Hambourg ou du Havre et les canots qui nous emmènent taquiner pingouins et lions de mers sur le Canal, les conteneurs colorés s'ajoutent aux couleurs vives des maisons basses et métalliques, les Duty Free qui s'enchaînent sur la Calle San Martin nous rappelle que l'espace temps se réduit inexorablement et les shoppers frénétiques descendus des quelques bateaux de croisières marchent du même pas que les routards aux gros sacs barbe épaisse et duvets roulés sur les épaules. Ushuaïa a la taille d'une petite ville à l'aplomb d'une haute montagne qui se jette dans la mer, comment dire, on la dirait blottie dans un tout petit écrin.
On choisit un petit backpack très chouette, le Yakush, puis nous embarquons pour une après-midi sur le Canal de Beagle. Bien sûr pas avec le « promène couillon » de 200 places, nooon, nous avons naturellement choisi la plus petite embarcation disponible : 8 personnes dont le capitaine et son second : mais rassurez-vous, même s'il y a un vent à décorner les bœufs 9 jours sur 10, ici la mer est plus calme qu'à Punta gallinas, nous sommes au cœur d'un enchevêtrement de langues de terre et de mer ; du coup nous nous sommes approchés tout près des lions de mer et des nids de cormorans : honnêtement nous ne sommes pas très « zoo » mais là vraiment, c'est presque émouvant !!! Les premiers vivent en cercles : au milieu de chacun un gros lion des mers – 2 fois le poids des femelles – et autour une 10 aine de lionnes, c'est super de les voir chez eux, à domicile, car cette fois ci c'est nous qui ne sommes pas chez nous :) Quant aux cormorans, de loin on dirait des pingouins, mais quand l'on s'approche on ne peut plus se tromper : leurs ilôts empestent le soufre et le pétard mouillé!!!
De retour pour l'apéro – au malbec cela va de soi ;), on étudie les cartes du parc national pour le lendemain.
Le parc est d'une grande beauté, les vents soufflent sans répit et après un pique nique au sommet de la Pampa Alta, que nous atteignons après avoir traversé une forêt grinçante des arbres couchés par les rugissants, nous ouvrons grands nos yeux devant les vallées, les monts enneigés plus impériaux les uns que les autres et les fjords allongés, avant de redescendre et de suivre – au pas de course car nous aurons été bien gourmands sur le timing des cartes de randonnées – le sentier côtier qui traverse le parc.
Et puis le lendemain cap à l'est d'Ushuaïa, un local nous a recommandé la Laguna Esmeralda : le bouquet final ! Comment dire d'abord vous partez du grand chalet d'un éleveur de chiens de traineau avec un gros poêle au milieu de la salle, ensuite vous traversez 1h de pampa aux couleurs rouge, jaune, verte de la montagne, et bleu glacier du torrent ou vert émeraude plutôt le torrent, le tout entouré de cimes enneigées qui pointent haut vers le ciel ! Ensuite vous rentrez dans la forêt – on dirait celle de Sherwood, plein d'arbres moussus, plein d'arbres penchés aussi, couchés par les tempêtes et vous commencez à grimper avec les chaussures qui chuintent sur la terre imbibée... 1h + tard on ressort tout près du torrent qui se divise en des dizaines de ruisseaux, toujours avec cette couleur vert émeraude de l'eau du glacier et on voit loin et on a l'impression que l'on va toucher ces pics enneigés...et enfin sans jamais l'avoir ne serait ce qu'entre-aperçu, au détour d'un petit col on se retrouve nez à nez avec le Lac Esmeralda, et son glacier qui descend vers la laguna, et c'est magnifique !!!!! (Spéciale dédicace à Papily : nous avons trouvé notre Lac de Vens de Patagonie;))
Ah oui j'oubliais entretemps nous avons expérimenté tous les temps : parce que la météo ici en Patagonie, ca change vite !!! C'est très simple : quand nous nous sommes réveillés à 7h00 il pleuvait, puis qd nous sommes rentrés sur le sentier : grand soleil, puis en sortant de la forêt il pleuvait de nouveau, avant que le brouillard nous embrouille puis qu'en arrivant au lac, bonne étoile, le soleil perce et brille de mille feux, mais il faut rester aux aguets chez les Patagons, en moins de deux, alors que nous avalions la dernière bouchée de notre délicieux jambon cru-avocat-tomates rincées dans le torrent, le ciel s'engrise, puis noircit puis un déluge de tout petits grêlons s'abat sur nous !!! C'était sublime, en moins de 10 min tout était blanc polystyrène !... Du coup nous avons renoncé à poursuivre la marche vers le glacier – ce que nous ne savions pas c'est que cette suite météorologique allait se renouveler... quatre fois dans la même journée !!! Mais bon sans regret – nous aurions eu l'air fin dans le brouillard au pied du glacier, il aurait fallu que l'on se mette à l'abri et que l'on guette la prochaine éclaircie – il nous a manqué JeanJean le Trappeur ;))
Qu'à cela ne tienne, nous ne laisserons plus avoir ! Nous reprenons notre route, aguerris, pour la Patagonie Chilienne, première étape de notre remontée vers La Quiaca, qui est au Nord Argentin ce que Ushuaïa y est au Sud.
